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En jeu de rôle, les joueurs sont généralement confrontés à des choix amenés par la situation. Selon le type d’enjeux qui priment, différents types de choix seront privilégiés.

Note : dans les points ci-dessous, quand je parle de MJ, il peut s’agir de MJ traditionnel, ou d’un ou plusieurs participants qui endossent une partie du rôle du MJ.

Le choix prévu

Le MJ propose une épreuve dont il prévoit la ou les solutions admissibles. Les autres idées ne sont pas acceptables.

C’est le cas des énigmes, selon moi, ce procédé pose un problème important : il demande aux joueurs de trouver ce que le MJ a en tête, ce qui signifie que le MJ doit toujours choisir des solutions que les joueurs pourraient trouver, mais pas trop facilement !

Dès que les solutions sont trop difficiles à trouver, les joueurs pataugent et le risque d’ennui n’est pas négligeable. Si les joueurs trouvent les solutions trop facilement, les épreuves n’ont pas vraiment d’intérêt.

Je pense qu’aucun jeu social n’a intérêt à proposer ce type de choix, pour la simple et bonne raison que les énigmes et les casse-tête sont des activités solitaires et que se réunir pour un temps limité n’a pas d’intérêt si c’est pour cogiter longtemps dans le but de trouver la solution.

Il n’y a pas pire sabotage du rythme d’une partie qu’un choix dont les joueurs ne trouvent pas la bonne solution après moult tentatives.

Le choix adapté

Le MJ propose une épreuve dont il ne prévoit pas les solutions admissibles. Il peut en prévoir, mais accepte celles qu’inventent les joueurs dès lors qu’il les juge adaptées.

Ce principe est très proche du « choix prévu », mais se distingue par le fait qu’il donne sa place à la créativité des joueurs. Le MJ se place en position de juge de la pertinence et de la qualité des propositions des joueurs.

De cette manière, on évite le problème du « choix prévu » du fait que plusieurs solutions sont possibles, cela peut inciter les joueurs à rivaliser d’inventivité pour surmonter les épreuve, si le MJ n’est pas trop exigeant ou trop accommodant (ce qui reste moins problématique de manière générale).

Il faut entretenir une parfaite confiance entre joueurs et MJ, afin d’éviter qu’un jugement soit considéré arbitraire et injuste. Permettre aux joueurs d’envisager les solutions possibles est un bon moyen de déjouer ce risque.

Vous pouvez également moduler votre niveau d’exigence de façon progressive au fil de la partie de façon à éviter que tout ne paraisse trop simple ou trop difficile : les premières épreuves seront très simples, vous accepter n’importe quoi de cohérent et les dernières très difficiles, vous n’acceptez que des idées inventives.

Le choix optimisé

Le joueur doit gérer les ressources à sa disposition afin d’optimiser ses chances de succès concernant une épreuve, voire la réussite de son objectif sur le long terme.

Ce choix que l’on peut aussi appeler choix tactique me paraît fonctionner d’autant mieux qu’il est cadré par les règles du jeu plutôt que par le jugement d’un participant. Par exemple, si le joueur sait que se mettre à couvert lui offre un bonus défensif, il sera tenté d’exploiter cette ressource dès que possible, tant qu’elle n’interfère pas avec son idée principale.

Le fait de laisser le MJ juger peut parfois donner un sentiment d’arbitraire et donc d’injustice et cela demande au MJ d’avantager ses adversaires pendant un affrontement. Si c’est le système de jeu qui encadre ce genre de choix, soit le meilleur choix devra être bon pour la dynamique du jeu (voir un jeu comme Poison’d de Vincent Baker) de manière à inciter les joueurs à le faire souvent, soit les choix possibles et leurs combinaisons (s’il en est) doivent tous se contrebalancer de façon à ce qu’aucun ne soit toujours meilleur ou moins bon que les autres, mais plutôt que leur utilité varie selon la situation.

Le choix formel

Dans une situation donnée, le joueur connaît les codes selon lesquels les choses doivent suivre leur cours. Il a la liberté de dire comment ce qui doit être est, voire, d’enrichir le champ de ce qui paraît acceptable.

Le choix formel n’est pas tant un choix influant sur les événements de l’histoire jouée que sur l’épaisseur de la fiction. Le but est d’apporter plus de Couleur, de renforcer la cohérence, la capacité de la fiction de nous faire vivre un rêve éveillé.

Le choix formel est généralement le choix principal des joueurs pour la situation. S’il est cumulé à d’autres types de choix, il sera bien plus secondaire, mais ne devrait pas constituer le point de focalisation des participants. Juste une plus-value.

Quand les joueurs n’ont pas en main les clés nécessaires à leur liberté créative, il arrive que le MJ doive corriger leurs choix, ce qui tend à déposséder les joueurs de leurs personnages et à saper leur liberté créative.

Le choix ouvert

Le MJ oppose une épreuve sans décider à l’avance des solutions possibles et en faisant en sorte que toutes les réponses que pourra apporter le joueur développe l’histoire de manière satisfaisante.

Le dilemme est une forme de choix ouvert, mais dès que ce qui compte dans un choix, c’est de voir quelles conséquences vont en résulter, on est dans un choix ouvert. Le dilemme se pose quand aucune des possibilités offertes ne semble valoir mieux que l’autre aux yeux du joueur.

Le choix ouvert signifie qu’il n’y a pas de bonnes et de mauvaises solutions, simplement, ce choix doit poser une question au joueur : « préfères-tu sacrifier ton meilleur ami ou mourir ? », « préfères-tu être traîné dans la boue ou perdre un bras ? », « préfères-tu trahir ton camp pour le protéger ou respecter tes valeurs quitte à le condamner ? » etc.

Toutes les réponses que donnera le joueur seront acceptables et l’histoire se poursuivra jusqu’à ce que toutes les questions posées aient trouvé une réponse.

Des choix ouverts nécessitent de manier l’improvisation, de façon à faire évoluer la situation en fonction des choix des joueurs (et non pas en prévoyant son déroulement à l’avance) afin de rendre les conséquences de leurs choix possibles quels que soient les choix effectués et de construire l’histoire autour.

Le MJ peut en préparer avant la partie ou les participants peuvent les construire pendant la partie. Dans le deuxième cas, il faut que la préparation des personnages, leurs objectifs, leurs convictions, leurs relations présentent des points d’achoppements, ou bien qu’elles offrent à un tiers participant de facilement dresser des choix ouverts.

Le système de jeu peut lui-même produire de ces choix (cf. Dogs in the vineyard, où le système de Conflits propose souvent : abandonner le Conflit ou utiliser la violence?).

Le choix ouvert peut tout simplement conclure une partie composée tout du long de choix autres, ce qui signifie que les fins possibles seront libres ; parfois le nombre de fins possibles étant limitées, le MJ peut envisager les conséquences possibles, mais cela devient ardu, voire contreproductif si une partie comporte plusieurs choix ouverts sur sa durée.

Ainsi…

Bien identifier les choix que vous voulez que votre jeu ou votre partie amènent vous permet de mieux préparer votre partie, les PJ et les PNJ, mais aussi décider comment les soutenir par un système adapté et cohérent.

Les choses à éviter

Voici plusieurs problèmes que je rencontre fréquemment et quelques conseils associés :

Les choix aveugles

Un choix aveugle est un choix désengagé. On pourrait aussi bien le tirer à pile ou face, ce qui signifie qu’il ne suscite aucun intérêt.

Quels que soient les choix que vous proposez, faites toujours en sorte que les joueurs puissent envisager leurs résultats ou leurs répercussions possibles.

Exit les choix du type : « couloir de droite ou couloir de gauche ? ». Il est important de permettre aux joueurs d’envisager le résultat de chaque choix, mais il est indispensable qu’il puisse toujours y avoir une dose d’imprévu.

Les choix sans enjeux

Les choix sans enjeux sont inutiles :

  • vous êtes devant la porte, qu’est-ce que vous faites ?
  • je frappe.
  • l’hôte t’ouvre…

(Mais quelle surprise !)

Si une situation ne présente pas d’enjeux (ne serait-ce que formels), inutile de laisser le choix, faites des ellipses, allez à l’essentiel.

Autre exemple :

  • vous êtes sur la route qui mène à la ville, que faites-vous ?
  • Eh bien… j’avance…
  • ok !

(Tous ces exemples sont du vécu)

Les temps de pause, les moments où les joueurs décompressent, sont en roue libre, sont néanmoins nécessaires, mais en évacuant les choix sans intérêt, vous pourrez distinguer ces parenthèses et les mettre en valeur.

Les pièges

Attention aux pièges ! Piéger vos joueurs n’est cool que si les joueurs ont des moyens de le contrecarrer, si les pièges ne tombent pas du ciel. Je ne parle pas seulement des trappes et des dalles qui actionnent des jets de fléchettes. Je parle aussi des coups de théâtre et autres ficelles scénaristiques.

Évitez les consensus

On peut prendre un peu de temps pour faire un choix, mais les discussions entre joueurs visant à mettre tout le monde d’accord pouvant parfois s’éterniser, elles me semblent pouvoir ternir rapidement une partie. Quand vous trouvez que les joueurs manquent de spontanéité, faites en sorte de clarifier vos situations. Si la situation est claire pour tout le monde, on ne spéculera plus, on règlera plus rapidement la question de qui fait quoi et comment.

Les joueurs craintifs

Si vous en avez marre que vos joueurs soient craintifs et ne déclenchent jamais d’actions flamboyantes et audacieuses :

  1. arrêtez de les piéger ;
  2. ne leur faites jamais subir arbitrairement des pertes (que ce soit perdre quelque chose comme une bourse d’or, ou perdre son personnage) ; permettez-leur d’avoir une emprise sur la mort de leurs personnages, qu’elle découle d’un choix, d’une prise de risque, plutôt que d’un manque de chance.

N’hésitez pas à commenter !