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Je ne mets plus d’énigmes dans mes parties de jeu de rôle. Qu’il s’agisse d’énigmes posées comme tel (le sphinx vous pose une colle) ou d’intrigues sous forme de puzzle derrière laquelle il faut comprendre l’astuce qui mènera les joueurs à la dernière étape, je pense qu’elles souffrent toutes d’un énorme problème : le temps de jeu.

Lorsqu’on joue à un jeu vidéo, par exemple : Silenthill 2, où des énigmes ponctuent l’histoire, ou n’importe quel Point and Click, eh bien si l’on passe 3 heures bloqués sur une énigme, ça ne gâche pas le jeu plus que ça, après tout, c’est un temps nécessaire pour trouver cette foutue clef pour ouvrir la porte du boss. Et bien souvent, on peut aller buter des monstres ou explorer d’autres lieux, pour y revenir plus tard, l’esprit frais… On est bien au chaud seuls avec notre canapé et notre manette.

Mais en JDR, on a une contrainte sociale : on se retrouve à quatre pour partager une fiction interactive, c’est pas pour passer une heure sur six (voire sur quatre) à réfléchir ou à buter connement contre une énigme.

Et là, vous découvrez que l’assassin n’est pas Mister Johnson !

  • Phil, le regard dans le vague : « merde, c’est qui alors ? » ;

  • François regarde Sophie dans le blanc des yeux ;

  • Sophie se gratte la tête : « ben, euh, on n’a plus de suspects » ;

  • Le MJ ricane ;

  • Phil se gratte le menton « qu’est-ce qu’on fait ? » ;

  • François joue avec ses dés ;

  • Phil se racle la gorge ;

  • ad libitum…

Je caricature… un peu. Faites l’expérience un de ces quatre : enregistrez un de ces moments pendant votre partie. Attendez une semaine et réécoutez-le comme si c’était une séquence d’un film. Même 10 minutes de débats et réflexion c’est vite épuisant.

En réalité, le problème de fond vient du fait que la difficulté d’une énigme est difficile à harmoniser avec la perspicacité de vos joueurs. Si elle est trop facile, elle n’oppose pas vraiment de résistance et s’avère sans saveur, si elle est trop difficile, on se retrouve dans le cas de figure ci-dessus et ça peut vite devenir ennuyeux pour tout le monde. Si l’on arrivait à doser immanquablement, je ne dis pas, ça aurait peut être un intérêt.

C’est sans doute pour ça que les jeux d’énigmes sociaux n’existent pas.

Pour y palier, il y a quelques rustines :

  • Les MJ tendent à ajouter des indices pour permettre aux joueurs de comprendre petit à petit un peu mieux le fond du truc ;

  • c’est aussi bien vu de ne pas bloquer la partie à l’énigme, il peut y avoir d’autres choses à faire en attendant, mais quand on revient à l’énigme, on a généralement pas réfléchi plus ;

  • l’énigme peut même être accessoire, afin d’éviter de bloquer la partie ;

  • il y a aussi les énigmes « pour faire semblant » : le MJ propose une énigme dont il sait que les joueurs en ont la clef et donc, ils ne galéreront pas longtemps ;

  • enfin, l’énigme que l’on peut résoudre en faisant autre chose (en allant capturer un PNJ, par exemple).

Tout ça pour dire : à quoi bon ? Dans les fictions, les personnages résolvent les énigmes pour le bien du scénario, on ne les voit pas réfléchir plus de 10 secondes. En JDR, on se tape ses moments qui durent parfois une éternité, où on se réunit un soir pour réfléchir collectivement à un problème que l’un d’entre nous a décidé de nous poser parce qu’il en avait envie…

Si vous êtes de véritables amateurs d’énigmes, jouez à des jeux vidéo ou à des jeux d’énigmes. Si vous aimez le JDR, n’y mettez pas d’énigmes.