Qui est en charge de l’adversité dans votre jeu ?

Cette question est de première importance pour la conception de vos jeux (dès lors que vous souhaitez sortir des schémas traditionnels).

Voici les quelques règles à prendre en compte :

  • jouer un personnage et son adversité en même temps, c’est ennuyeux (c’est ce que l’on appelle « principe de Czege », énoncé par Paul Czege sur The Forge et qui revient régulièrement dans les discussions) ;
  • cela signifie que vous aurez, dans la majorité des cas, besoin de différencier les rôles des participants, de façon à ce que certains jouent l’adversité pendant d’autres jouent les protagonistes ;
  • l’adversité nécessite toujours un minimum de préparation, que ce soit par les buts ou les problèmes des personnages (cf. My Life with Master de Paul Czege), une situation de crise, une intrigue (cf. Dogs in the Vineyard, Innommable), voire, la structure-même de jeu (cf. Zombie Cinema) ;
  • l’adversité peut être centralisée sur un participant ou répartie sur plusieurs, c’est ce que nous allons creuser à présent.

Note : tous les schémas présentés ci-dessous peuvent fonctionner avec des rôles fixes ou par alternance.

a) Adversité centralisée

Un participant produit de l’adversité pour tous les autres. Dans beaucoup de JDR, les PJ peuvent s’affronter, mais ce n’est pas toujours l’un des buts du game design ; on peut également envisager que ce ne soit pas pris en compte ou encouragé par le jeu.

Rôles par alternance

D’une scène à l’autre ou à des moments clé, le participant produisant l’adversité échange son rôle avec un autre, le précédent joue alors un PJ créé à l’avance ou à la volée (cf. Monostatos, Innommable ou Gloria).

À noter que dans un jeu tel que Monostatos, chaque scène jouée est centrée sur un PJ ou sur le MJ ; les autres joueurs peuvent décider d’intégrer à tout moment leurs PJ dans la scène d’un autre ou bien aider aux descriptions du décor et des PNJ. Ils peuvent de cette manière contribuer à l’adversité. Si tel est le cas, on permute vers un schéma de type c).

b) Adversité inter-PJ

 

L’adversité inter-PJ possède une structure similaire à l’adversité centralisée (a), à la différence que l’adversité entre PJ revêt une certaine importance dans la construction du jeu.

L’adversité inter PJ peut être un moteur du jeu (cf. Zombie Cinema) ou émergente (cf. Dogs in the Vineyard ou Poison’d).

Dans Zombie Cinema, un joueur cadre une scène problématique à tour de rôle. La progression des zombies est signifiée par un pion sur une sorte de « jeu de l’oie » qui menace à tout instant de rattraper les pions des joueurs. Pour avancer sur le plateau et donc se mettre hors de danger, les joueurs doivent jouer des conflits PJ à PJ. Ici l’adversité entre PJ est donc centrale.

Dans Dogs in the Vineyard, le MJ dresse une situation ambivalente où les PJ auront le même but : traquer le péché et rendre la justice, mais l’ambivalence des situations tend à amener fréquemment les PJ à des désaccords, elles sont faites en partie pour ça. Les mécaniques de résolution du jeu sont faites pour pouvoir gérer les conflits entre PJ.

c) Adversité centralisée + personnages neutres

 

Ce schéma centralise l’adversité sur un participant principal contre un protagoniste et offre à un ou plusieurs participants de jouer les électrons libres, c’est à dire de choisir de soutenir l’un ou l’autre des deux partis.

Par exemple : dans Polaris de Ben Lehman, le Cœur joue le protagoniste de l’histoire, le Fourvoyé joue l’antagoniste principal et les deux Lunes jouent des PNJ liés au protagoniste pouvant jouer plus ou moins avec ou contre le Cœur.

Dans les Cordes Sensibles, le Metteur en scène cadre une scène autour d’un Protagoniste (PJ) en y intégrant l’adversité. Les joueurs restant (s’il y en a), peuvent intégrer leurs PJ ou jouer des PNJ et soutenir le protagoniste ou le confronter.

Ces deux jeux échangent les rôles à chaque scène, chaque joueur peut être tour à tour protagoniste, adversaire principal ou personnage neutre.

On peut également envisager d’utiliser ce schéma sans alternance. Il est généralement utile pour développer des histoires centrées sur un seul protagoniste à la fois.

d) N opposants, N protagonistes

 

Vous pouvez bien sûr imaginer toutes sortes de configurations, 1 PJ et plusieurs MJ, plusieurs PJ et plusieurs MJ, jouant des adversités préparées ou émergentes. Vous pouvez également ajouter des personnages neutres à votre guise, toutes les configurations sont possibles.

Questions bienvenues.

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5 Responses to Centraliser ou partager l’adversité

  1. Avec des schémas comme ça… on sait bien où elle se trouve l’adversité.

    Très bonne article à part ça !

  2. Haha, il m’a fallu du temps, mais oui, pour sûr ! C’est Sens ! ^^

  3. edophoenixNo Gravatar dit :

    Pas de question particulière, mais très bonne mise en schéma, je n’ai pas l’impression qu’il y aie d’oubli.
    Ca me fait penser à l’article «  »le problème c’est le choix » », qui développait l’étude des scénarii en arborescence, dans un Casus Belli deuxième édition dont je ne me souviens plus du numéro !

  4. Merci Edouard pour ton commentaire,
    je n’ai pas lu l’article que tu cites, l’analogie que tu fais concerne les schémas ou le propos également ?

  5. […] principe a largement irrigué diverses réflexions sur le partage de la narration et apparaît tout à fait pertinent dans une pratique où les joueuses jouent pour défendre les […]

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